L’évolution de la gestion des connaissances dans les organisations

L’évolution de la gestion des connaissances dans les organisations

 

 par Joël Muzard, Ph.D., 

Applied Intelligence Atelier (A-I-A) Montréal, Canada

 

 

Résumé

 

Les organisations prennent conscience de l’importance dans l’équation des résultats de ce qu’on appelle aujourd’hui la connaissance, le savoir, le savoir-faire. Comment les organisations s’approprient de cette notion? Comment cette notion – la connaissance – évolue et comment elle est utilisée? Comment évolue la façon même de travailler et de produire des résultats? Comment les organisations s’approprient de cette nouvelle façon de gérer? Nous retraçons ce parcours et nous présentons des conclusions.

 

Mots-clés : Évolution de la Gestion des connaissances – Évolution de la compréhension de la connaissance dans les organisations – Nouvelles façons de travailler

 

Introduction

Le but du présent article est de clarifier et démystifier la notion de «gestion des connaissances». Que revêt comme signification cette notion aujourd’hui ? Quelles en sont les dimensions pratiques ? Comment pouvons-nous améliorer le partage et l’utilisation du savoir-faire dans nos organisations ? Comment pouvons-nous contribuer à réaliser une meilleure gestion et aider à la production de meilleurs services et résultats?

 

Selon nous, la connaissance, c’est quelque chose de vivant, organique, un flux qui circule entre des personnes qui relèvent un défi ou sont dans une perturbation ou bouleversement,  dans un contexte spécifique avec des valeurs et un langage partagés, qui leur permet d’arriver au but efficacement, de façon experte.

 

 

 

Situations, expériences

«L’infirmière regarde les symptômes du patient, avec une approche bio-psyco-sociale. Puis elle regarde les hypothèses que ces symptômes suggèrent. Elle écoute ce que son esprit lui suggère. Elle décide ensuite des actions, avec l’objectif de réduire les symptômes et augmenter la qualité de vie du patient», nous déclare une infirmière-pivot, acteur-clé du système de santé dans une région du Québec. Combien d’années d’expérience sont nécessaires pour développer ce niveau de connaissances qui fait la différence entre les novices et les experts?

 

Une «tempête» va se déclarer dans un établissement de santé de haute sécurité. Les «vieux» (quelques employés amicalement appelés «les vieux» parce qu’ils cumulent beaucoup d’années d’expertise et d’expérience) sentent cela, et agissent dans quelques secondes pour éviter le bouleversement, les pertes de vie et les blessures. Ça ne s’apprend pas à l’école, savoir prévenir une émeute en milieu de haute sécurité avec cette qualité d’intervention. Comment se développent ces connaissances? Comment les faire circuler dans l’organisation? Comment identifier les connaissances stratégiques cruciales pour l’organisation? Comment motiver les membres de l’organisation au partage? Qu’est-ce qui va se passer lorsque ces personnes vont quitter cette organisation?

 

Jean Tremblay a des graves problèmes de santé et il a mal. Il découvre, sur Wikipedia, la source du problème, la bactérie C-difficile (Clostridium difficile-associated diarrhea). Il court vite aux services des urgences sans rendez-vous, les examens confirment le diagnostic et une solution est mise en route pour rétablir l’équilibre de santé. Qui a contribué à écrire l’article qui a aidé M. Tremblay? C’est quoi, Wikipédia? Pourquoi y a-t-il des personnes qui partagent des connaissances? Pourquoi les personnes vont se renseigner sur des wikis et autres sources disponibles?

 

Vous êtes le Directeur de la Santé et Sécurité au Travail de la Région où un éboulement vient d’avoir lieu dans une mine. Des miniers sont bloqués à plusieurs mètres de profondeur. Un événement très improbable mais complexe. Comment allez-vous gérer la situation? Faites-vous partie d’un réseau de collègues qui pourra vous supporter? C’est quoi, une communauté de pratique? Pourquoi consulter des équipes spécialisées de la NASA dans ce cas en particulier?

 

Mme Giselle Garcia, travaille dans un établissement de Santé. Elle est préposée à l’Accueil des patients avec graves problèmes psychologiques. Elle a plus de 20 ans d’expérience, pas de formation formelle. Elle  prend des vacances. Le service est bouleversé, la nouvelle préposée qui remplace a des compétences, mais ne sais pas comment faire face aux patients qui sont en difficulté ni comment les orienter vers les services pertinents. Les médecins et professionnels perdent beaucoup de temps à ré-équilibrer la situation. Le service devient moins efficace. Les connaissances sont parties en vacances? Comment gérer les connaissances?

 

Pouvez-vous parler d’autres situations et expériences qui mettent en évidence l’importance des connaissances profondes et pratiques des gestionnaires et professionnels dans votre organisation?

 

 

Un peu d’histoire

La Gestion des connaissances a commencé à faire parler d’elle dès les années 1990 d’une nouvelle façon, en parallèle avec les travaux de Peter Senge sur L’Organisation Apprenante (Senge, 1990). Dans une entrevue au Journal Les Affaires du 11 mai 1996, Hubert St-Onge, alors Vice-Président et responsable du Centre de leadership de la Banque CIBC,   déclarait : «Si l’ère industrielle a célébré la primauté des biens tangibles, l’ère actuelle s’appuie fortement sur le Capital Intellectuel. Et les entreprises qui donneront peu d’importance à cette nouvelle perspective s’exposent simplement au syndrome de la mort subite».

 

Une étude de Charles C. Mann (2005) dans «1491 : New revelations of the Americas before Columbus» illustre ce cas de façon brutale: le système immunitaire des habitants des Amériques en 1491 n’était pas préparé pour se défendre lors de l’arrivée non-prévue des Européens : un désastre s’en est suivi. Nous pourrions ajouter que l’ère industrielle nous a enseigné comment augmenter la force musculaire. Maintenant, le défi est d’augmenter la force de l’esprit. L’effet de levier s’obtient aujourd’hui, par exemple, avec la collaboration instantanée en temps réel des personnes, sans barrières géographiques, le dénommé «effet Wikipedia», selon les auteurs de «Wikinomics : How Mass Collaboration Changes Everything». (Tapscott et Williams, 2006).

 

La notion de connaissance est en pleine évolution dans les organisations. Cette évolution marque des vagues ou générations de la gestion des connaissances. Nous allons voir cela plus en profondeur dans l’évolution de la gestion des connaissances.

 

 

L’évolution de la gestion des connaissances

Les idées de Druker concernant les travailleurs du savoir, l’économie du savoir et la connaissance, un avoir de l’organisation aussi important que le capital ou la propriété, font du chemin.

 

En 1998, «Harvard Business Review» publie son «Review on Knowledge Management», destinée aux gestionnaires. On y retrouve différents auteurs qui ont marqué de façon significative la discipline. À titre d’exemples, on y rapporte des auteurs tels que Peter Drucker, avec «The coming of the New Oganization» ; Ikujiro Nonaka avec «The Knowledge Creating Company»; David Garvin, avec «Building a Learning Organization»; Chris Argyris avec «Teaching Smart People How to Learn»; Dorothy Leonard and Susan Straus «Putting Your Company’s Whole Brain To Work; Art Kleiner and Gearge Roth avec «How to Make Experience You Company’s Best Teacher»;

 

Comment les organisations s’approprient de cette nouvelle façon de gérer?

Les organisations s’approprient de la gestion des connaissance selon la compréhension et la conceptualisation progressive de la notion de connaissance dans les organisations. Chaque période, constituée par des nouvelles pratiques de gestion des connaissances, se développe par l’effet de nouvelles prises de conscience et de compréhension sur où réside la connaissance dans l’organisation, comment elle circule, quelle en est notre compréhension actuelle, quels sont les outils disponibles, et quels sont les savoirs-faire importants pour le succès de l’organisation.

 

Nous allons très brièvement parcourir ces phases:

 

Ph1  – Mettre en valeur le savoir explicite: les systèmes de gestion de contenu. Période de la collection, de la prédominance de la technique sur l’humain.

Ph2  – Mettre en valeur le savoir de l’expérience: Les communautés de pratique, trouver les connaissances importantes, les processus d’apprentissage des équipes de travail : Période de la connexion

Ph3  – Mettre en valeur les connaissances collectives : Créer de nouvelles connaissances dans le contexte des conversations qui intègrent des contextes et des perspectives : Période de la conversation et l’apprentissage social

Ph4  – Mettre en valeur la connaissance en temps réel et gérer des environnements plus complexes et improbables : Période de la Transparence. Les usagers contrôlent le contenu socialement. Émergence du facteur de l’intelligence des groupes qui travaillent en temps réel.

 

 

Dans la première période, la prédominance a été la construction de dépôts de données et de document qui capturent la connaissance explicite.

 

Les organisations se sont rendu vite compte, dans les années 2000, qu’elles avaient laissées de côté la connaissance la plus importante, dite «tacite» selon Polanyi (1958). Elles ont compris que:

– La plupart des connaissances organisationnelles sont dans l’esprit des employés, des collaborateurs. Un petit pourcentage réside dans des documents, et une explicitation des savoirs s’avère utile et devrait être réalisée ;

– La plupart des connaissances organisationnelles sont dynamiques et changent rapidement, donc ce qui est «capturé» ne sera bientôt plus d’actualité ;

– Les connaissances sont essentiellement sociales et sont développées par des groupes de personnes qui sont engagées ensemble dans des pratiques et dans des contextes spécifiques et qui prennent soin de leurs savoirs.

 

L’influent livre d’Etienne Wenger, Mc Dermott et Snyder, arrive en 2002. On parle de «cultiver la connaissance dans les groupes». Les organisations supportent alors les communautés de pairs et ainsi favorisent une mise à jour continue des savoirs. Vers les années 2005, les Fortune 500 avaient des communautés de pratiques établies et reconnaissaient que la connaissance émane des groupes qui apprennent en communauté.

 

Cette deuxième période est aussi marquée par le travail de Nonaka et Takeuchi (1995) qui apporte la discussion sur la distinction «connaissance tacite» et «connaissance explicite», en interprétant les travaux de Polanyi pour leur modèle (SECI pour Socialization, Externalization, Combination, Internalization). Le modèle présenté par Nonaka, est de convertir ou «extraire» les connaissances internes tacites pour les emmener dans une sphère publique «explicite».

 

Selon Snowden (2002), il faut mieux comprendre la connaissance et comment elle circule. La troisième vague commence, celle de mise en valeur de la connaissance collective dans une approche plus organique et stratégique. La notion de connaissance tacite évolue encore poussée par les travaux de Polanyi et de Damasio (1999).

 

Les organisations sont maintenant à réfléchir sur les questions stratégiques. Des nouveaux processus font surface, qui permettent de nouvelles formes de travail collaboratif et de circulation des connaissances. Les processus utilisés pour mettre en valeur les connaissances collectives sont basés sur la conversation. Petit à petit, les réunions régulières se transforment en rencontres stratégiques.

On prend conscience de la complexité et que les leaders ne peuvent avoir toutes les réponses, donc leur rôle change pour faciliter les conversations et la circulation des savoir-faire distribués.

 

Dave Snowden, explique : la séparation du contexte, de la narration et de la gestion du contenu dans les approches de troisième génération les rend plus efficaces. En comprenant les limitations et les capacités de chaque médium, l’esprit, la bouche, les mains, nous les faisons plus efficaces, et la combinaison du tout est plus grande que la somme des parties. “I always know more than I can say, even after I have said it, and I can always say more than I can write down.” Dave Snowden, 2002.

 

 

Dave Snowden est l’inventeur de Cynefin, qui réfère aux facteurs multiples de notre environnement et de notre expérience qui nous influencent d’une façon que nous ne pouvons pas comprendre. Il propose l’idée de la gestion organique. Il travaille sur les notions de Sensemaking, de Story Telling et les principes de la Narration. Il intègre l’approche ethnographique comme méthode de recherche en gestion des connaissances, pour se rapprocher de l’expérience là ou elle a lieu avec les acteurs concernés.

 

Dans cette période, les entreprises apprennent à utiliser les possibilités des réseaux sociaux, le Web et de nouveaux outils pour mettre en valeur la connaissance collective, dans une perspective de conversation organisationnelle. Les entreprises prennent avantage, par exemple, du «crowd sourcing» – la richesse collective -, de la diversité cognitive et émotionnelle, en utilisant une base plus large pour réfléchir à l’interne et a l’externe, pour augmenter l’innovation.

 

 

Une nouvelle période s’annonce.

Les nouveaux outils, qui s’appuient sur les avantages et les réflexions de la période précédente, et qui changent alors la façon de faire, amènent une nouvelle prise de conscience. Pour Dixon (2010), c’est la conversation, l’outil à privilégier.

 

Traditionnellement, nos efforts sont de gérer l’énorme volume d’information qui ensevelit les organisations chaque jour. Nous avons avantage à concentrer nos efforts sur la production de valeur à partir du capital intellectuel de l’organisation. Et à concevoir l’organisation comme une communauté.

Lors d’un «Café-Lab des-connaissances» de la communauté de Gestion des Connaissances de Montréal, nous avons réfléchi sur comment la révolution du «sur-demande» alimente la nouvelle économie des connaissances, selon les auteurs du «Tao of Disruption and Innovation». Pour Barth et Snowden (2007), les moyens technologiques dont nous disposons maintenant permettent d’opérer avec de nouvelles façons de faire. Ces nouvelles percées technologiques permettent une participation active des clients et usagers qui deviennent acteurs du processus.

 

L’organisation n’a plus besoin d’un espace physique pour se définir, elle est davantage définie par ses engagements à donner des solutions aux problèmes complexes des clients en temps réel. Les membres de l’organisation peuvent maintenant êtres reliés par des réseaux sociaux et réfléchissent et agissent de façon stratégique avec des connaissances selon des contextes de plus en plus complexes et difficiles à cerner.

 

Chaque individu dans un groupe ad-hoc devient comme un neurone d’une organisation qui tisse une nouvelle toile «cognitive» qui permet l’émergence de nouvelles idées et solutions en temps réel.  Ces idées, qui s’articulent sur une nouvelle épistémologie de la connaissance, contribuent à l’utilisation de nouveaux outils qui facilitent la co-construction des connaissances dans un groupe spécifique dans un contexte donné qui travaille sur un problème particulier en temps réel avec un langage commun (Muzard, 2009).  Selon les chercheurs du MIT, il est important que le leader et le groupe développent leur sensibilité et habiletés sociales et que tous puissent contribuer de façon horizontale leur idées en tout temps, sans restrictions (Anita Williams Woolley, et al., Science 330, 686 (2010). L’évidence du facteur de l’intelligence collective du groupe qui émerge quand certains facteurs sont présents.

 

Ce qui en résulte pour les managers, c’est la possibilité de gérer en temps réel, de gérer l’attention et la motivation, de développer et stimuler la capacité de nommer les choses et les événements et les relier avec les savoirs-faire distribués déjà disponibles dans les personnes de l’organisation ou ailleurs, pour prendre des décisions ici et maintenant, dans le contexte spécifique de la situation-défi ou bouleversement complexe non prévu.

 

Les facteurs les plus importants sont la sensibilité et les habiletés sociales des participants et la possibilité de contribuer et de co-construire en temps réel à tout moment, sans restrictions.

C’est très motivant et pratique.

 

Nous présentons deux exemples.

 

L’exemple de la Communauté de la Gestion des connaissances pour le Développement – KM4DEV – ,  un phénomène émergent, et sa dimension francophone, SA-GE

KM4DEV: Lire La Communauté de la Gestion des connaissances pour le Développement. C’est une communauté internationale de personnes qui à la fois valorisent et mettent en pratique la gestion des connaissances et le développement international, pour aider les régions et les personnes les plus démunies, dans des domaines comme la santé. Cette communauté, selon Lucie Lamoureux, Sebastiao Ferreira et Sophie Treinen, membres du Noyau bénévole, se développe parce qu’il y a un intérêt et des avantages pour les praticiens de la coopération internationale de partager leurs savoirs et de faire plus avec moins. Les défis sont énormes, les ressources limitées. Les praticiens du développement international se partagent des processus et méthodes de gestion des connaissances, qui sont disponibles par exemple dans des Boites à Outils et chez les praticiens les plus expérimentés qui sont là pour échanger.

 

Cela nous semble un bon exemple pour nous motiver à mettre en place des programmes de gestion des connaissances, pour former des praticiens-experts qui développent des connaissances profondes et pratiques et qui deviennent les moteurs de l’organisation.

 

Le projet Aula Digital avec des Universités au Chili

 

Le projet Aula Digital , réalisé avec un ensemble d’Universités au Chili, est un projet de réflexion et de mise en pratique des nouveaux concepts présentés dans cet article pour concevoir et réaliser de nouvelles façons de faire en Apprentissage, Formation et Entraînement dans le contexte de la Société de la Connaissance du XXI siècle. Ce projet peut-être suivi à la page Web : http://www.a-i-a.com/auladigital De nouvelles façons de faire sont mises de l’avant pour augmenter l’intelligence des participants.

 

Comment cultiver et faire circuler la connaissance stratégique dans l’organisation?

 

Dorothy Leonard et Walter Swap (2005), par exemple, ont réfléchi à ces questions et proposent des pistes de solution. Ils créent de nouveaux termes, les Deep Smarts, les connaissances profondes et pratiques qui sont en fait proches de la sagesse et basées sur l’expérience.

 

Selon Leonard et Swap, il y a dans l’organisation des personnes qui possèdent une intuition, un jugement et des connaissances, à la fois explicites et tacites, emmagasinées dans leur esprit et dans leurs mains, dans leur corps. Leurs connaissances sont essentielles. Ils sont, par comparaison avec d’autres, des experts. Ils possèdent des «Deep Smarts», une intelligence profonde et pratique qui est formée par l’expérience directe, et ce n’est pas une exagération de dire qu’ils forment la base de la viabilité de l’organisation, le noyau vital de savoir-faire.

 

L’intelligence profonde ou expertise pratique, les Deep Smarts, est une forme d’expertise basée sur l’expérience. Il est très important que les gestionnaires comprennent et apprécient cette expertise pratique, pour leur propre bénéfice et celui de leur organisation. Cette expertise est basée sur des expériences de première main, qui ont contribué à des prises de conscience, en interaction avec les connaissances tacites et modelé selon les croyances et les forces sociales. Cette forme des connaissances est très proche de la sagesse. Ces connaissances sont basées plus sur du savoir-faire que du savoir-quoi.

 

Les groupes sont un espace privilégié pour développer des connaissances, lorsque le groupe partage le même langage organisationnel, les buts, les pratiques et les disciplines. Lorsque les groupes deviennent des «tribus» c’est encore mieux pour faciliter la circulation des savoir-faire. Les tribus sont des communautés de personnes qui pensent de façon très similaire. Ils aident les nouveaux à trouver les processus appropriés, stimulent les associations avec des experts, aident à socialiser les valeurs, partagent leurs passions avec pour mission de réunir tout le monde ensemble. Les participants des tribus obtiennent plus que des connaissances, ils apprennent le know-how, le savoir-faire. On les appelle les communautés de pratique qui évoluent vers des réseaux d’inter-apprentissage, et un esprit collectif.

 

Le transfert des connaissances selon Leonard et Swap est plus relié à des formes de «coaching» qu’a la formation traditionnelle. Les Coachs possèdent un savoir faire du domaine qu’ils sont capables de partager avec d’autres. Les mentors peuvent coacher les novices à condition de bien vouloir coacher et à condition que les novices le veulent bien, car cela met en lumière leurs statuts de novice. Cette action de transfert requiert un coach expérimenté et habile, et un apprenti capable, qui a des récepteurs préparés dans son esprit et qui est capable d’apprendre.

 

Il est plus productif d’apprendre avec des situations d’apprentissage direct. Les apprentissages seront beaucoup plus efficaces. L’expérience directe nous apporte quelque chose dans la mémoire que nous serons capables de relier à des situations (Damasio 1999, 2006) avec de très bons résultats.

 

Implications pour les organisations.

Tel que mentionné, les connaissances profondes et pratiques développées par les experts sont les composantes des «core capabilities» de l’organisation, le moteur de l’organisation. Selon les situations, les organisations peuvent prendre différentes stratégies.

 

Pour y arriver, nous pouvons réfléchir avec Marylène Gagné (2009) sur les principes qui sous-tendent la motivation pour le partage et la circulation des connaissances dans les organisations. Gagné souligne que l’avantage compétitif des organisations dépend d’une gestion efficace des connaissances et de l’apprentissage organisationnel. Elle parle de la collaboration et de la co-construction de connaissances, vitale pour les organisations. Pour y arriver, il faut compter sur les employés, les professionnels, les participants, les clients et leurs motivations. La motivation au partage des connaissances est cruciale. En regardant plus l’organisation comme un écosystème où les solutions se co-construisent avec des engagements en temps réel et sans barrières, et les leaders agissent comme des motivateurs et facilitateurs de conversations.

 

Conclusion

Selon nous, la connaissance, c’est quelque chose de vivant, organique, un flux qui circule entre des personnes qui relèvent un défi ou sont dans une perturbation ou bouleversement,  dans un contexte spécifique avec des valeurs et un langage partagés, qui leur permet d’arriver au but efficacement, de façon experte.

 

Nous pouvons résumer la gestion des connaissances aujourd’hui par une proposition en six points. Pour développer les connaissances profondes et pratiques, et en faire bénéficier l’organisation, les leaders contemporains prennent plaisir à :

 

  1. Développer des nouveaux modèles mentaux de collaboration pour le succès selon la mission et selon les valeurs et croyances des participants ;
  2. Développer de nouvelles structures sociales humaines : les réseaux d’inter – apprentissage et de nouvelles pratiques ; Faire émerger le facteur d’intelligence collective.
  3. Mettre en place des nouvelles technologies et des espaces de collaboration qui facilitent la co-construction en temps réel des connaissances profondes et pratiques et leur circulation
  4. Promouvoir, faire la «vente» motivationnelle interne et externe des réseaux d’inter – apprentissage ;
  5. Mesurer et partager les succès en terme de «Bonnes-Histoires-qui-circulent» et des coûts – bénéfices : Les participants montent dans l’échelle des connaissances profondes et pratiques, la satisfaction des participants et le noyau de savoir-faire de l’organisation se développe, les services augmentent leur qualité et efficacité de service, les gestionnaires et les professionnels prennent des décisions avec des connaissances profondes et pratiques en temps réel, la valeur de l’organisation augmente ;
  6. Développer le leadership distribué et la passion pour une organisation qui apprend de façon continue, en fonction de sa mission. Un leadership qui stimule l’apprentissage et la mise en action de la sensinilité et des habiletés sociales et du partage en temps réel des idées pour augmenter l’intelligence des groupes.

 

Invitation à participer à la conversation

Les praticiens de la gestion des connaissances de Montréal, du Québec et de la francophonie  se réunissent chaque mois sans barrières, dans une rencontre où ils échangent et pratiquent l’art de la conversation sur un sujet donné qui les préoccupe pour échanger des connaissances et des savoirs-faire . Ils constituent une communauté de pratique, un réseau social d’inter – apprentissage distribué, un écosystème avec une belle atmosphère. Ils utilisent des outils qui facilitent les conversations en temps réel. Les sujets qui ont été abordés ici sont continuellement discutés et enrichis avec des expériences de premier ordre. Vous aussi, vous pouvez participer, sans barrières géographiques, dans le respect de la diversité, à «KM-GC-MONTREAL». (http://www.a-i-a.com/KM-GC-MONTREAL ). Et aussi au Co-Lab du Savoir : http://www.colabdusavoir.com . Une expérience enrichissante! C’est vivant.

 

 

 

Remerciements

 

Pour ce travail, nous avons bénéficié des longues et fortes discussions aux Café-Lab des-connaissances de KM-GC-MONTREAL. Nous voulons en particulier souligner les apports de Pascal Bernardon et Duncan Sanderson. Nous avons aussi bénéficié des apports de membres de KM4DEV, comme Lucie Lamoureux, Sophie Treinen et Sebastiao Ferreira. Nous tenons à remercier Nicolle Bellemare pour nous avoir fourni beaucoup d’informations et pour le temps consacré à lire les copies de travail.

 

Les communautés de gestion des connaissances partagent leurs documents et conversations sur le Web et nous en sommes très reconnaissants.

 

Nous devons aussi souligner les apports des étudiants de nos formations qui ont partagé des expériences directes et des interventions. Nous avons changées certaines données dans un but avoué d’anonimiser ces informations.

 

Les erreurs nous les assumons, c’est notre interprétation. Merci à toute la grande communauté de Gestion des connaissances.

 

 

 

Références

 

 

 

Antonio Damasio (2006), L’erreur de Descartes, Odile Jacob

 

Antonio Damasio (1999) The Feeling of What Happens: Body and Emotion in the Making of Consciousness, Harcourt

 

Anita Williams Woolley, Christopher F. Chabris, Alex Pentland, Nada Hashmi, Thomas W. Malone (2010) Evidence for a Collective Intelligence Factor in the Performance of Human Groups; 29 OCTOBER 2010 VOL 330 SCIENCE www.sciencemag.org

 

Francisco Varela, Evan Thompson and Eleanor Rosch (1991). The Embodied Mind: Cognitive Science and Human Experience. MIT Press.

 

Marylène Gagné (2009) A model of Knowledge-Sharing Motivation Human Resource Management, Human Resource Management, July–August 2009, Vol. 48, No. 4,  Pp. 571– 589. 2009 Wiley Periodicals, Inc.

 

Michael Polayni (1958) Personal Knowledge: Towards a Post-Critical Philosophy.  University of Chicago Press. ISBN 0-226-67288-3

 

Maturana, Humberto & Varela, Francisco ([1st edition 1973] 1980). Autopoiesis and Cognition: the Realization of the Living. Robert S. Cohen and Marx W. Wartofsky (Eds.), Boston Studies in the Philosophy of Science 42. Dordecht: D. Reidel Publishing Co. ISBN 90-277-1015-5 (hardback), ISBN 90-277-1016-3 (paper)

 

Nancy Dixon (2010), blog (http://www.nancydixonblog.com/2010/08/the-three-eras-of-knowledge-management-summary.html)

 

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Dorothy Leonard, Walter C. Swap (2005) , Deep Smarts, How to Cultivate and Transfer Enduring Business Wisdom, HBSP, Boston, MA, USA

 

Dave Snowden (2002)   «Praparing for Conversations with David Snowden», http://kwork.org/Stars/snowden.html), Draft Chapter on KM Generations

 

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KM-GC-MONTREA http://www.a-i-a.com/KM-GC-MONTREAL Vu le 12-Février-2012

 

Peter Senge (1990), The Fifth Discipline: The art and practice of the learning organization, Doubleday, New York.

 

Steve Barth et Dave Snowden (2007), The Tao of Disruption and Innovation, in  Subrah S. Ivar et Cindy Gordon (2007) Why Buy the Cow? How the on-demand revolution powers the new knowledge economy, Chapitre 12.

 

Muzard, Joel (2009) La conception énactive d’un outil pour faciliter le travail cognitif d’un groupe sur le Web, ACFAS, Ottawa

 

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Review on Knowledge Management (1998) Éditions HBR

 

Tapscott et Williams, 2006 : Wikinomics : How Mass Collaboration Changes Everything.

Joël Muzard

Passionné par l'apprentissage, les connaissances et le mouvement. Aime accompagner les organisations, les personnes et les entrepreneurs dans leurs projets qui mettent en valeur leur savoir-faire. Aime partager ce qu'est le Knowledge Management ou Gestion des Connaissances dans ses multiples déclinaisons, comme Transfert des connaissances, Communautés de pratiques, Espaces Ouverts de collaboration, Espaces virtuels de collaboration en temps réel sans barrières géographiques, Résolution de défis complexes, en prenant avantage des nouvelles technologies Web et des nouvelles formes de communication. Aime aussi pratiquer des formes de communication et conversations corporelles comme le contact-improvisation, la photo, le vélo et l'expérimentation de plusieurs formes artistiques, comme la musique électro-acoustique. www.a-i-a.com/experiencefr/cvjm.html

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