Manageur embarqué au management augmenté
Récemment (si on peut dire), j’ai écrit quelques articles(5) sur l’impact de l’IA dans les organisations, l’employé augmenté mais rien sur le management augmenté.
Ce petit article a pour objectif de compléter, résoudre ce dernier point en mettant en perspective l’évolution du management avec l’intégration de l’IA. : On parlera alors de management augmenté.
« L’intelligence artificielle est-elle une transformation de plus dans un univers entrepreneurial en mutation ? » De mon modeste avis, on est plutôt sur une révolution dont l’impact va se faire de plus en plus ressentir dans les entreprises, mais aussi la façon dont l’entreprise, les ressources humaines vont être gérées.
Je donnerais un peu plus tard un exemple concret de cette gestion.
Depuis 3 – 4 ans , cette technologie commence à s’intégrer dans les entreprises dans des secteurs de plus en plus précis afin de fournir une aide à la décision. Des algorithmes intelligents siègent désormais à des conseils d’administration pour motiver la décision des exécutifs (1).
Plus qu’une adoption native de l’Intelligence artificielle, celle-ci embarque le manageur avec elle au fil du temps et transforment la manière dont l’individu interprète le monde et, par conséquent, ce sur quoi il fonde ses décisions.
L’humain augmenté devient progressivement parti intégrante de l’entreprise, connecté par implant aux objets de son travail ou environnement.
Du manageur embarqué vers le manageur augmenté.
Les individus peuvent avoir différentes missions, à prédominance humaine (management, collaboration), créative (innovation, recherche), administrative (comptabilité, secrétariat), opérationnelle (agents exécutants, maintenance), éducationnelle (formation), exécutive (gouvernance et prise de décision). La technologie ou les algorithmes d’IA nécessaire pour augmenter l’individu est différente selon le focus de la tâche à accomplir.
Mme si l’Intelligence artificielle ne permet pas actuellement d’avoir une approche aussi ouverte et synthétique qu’un manageur, mais elle peut proposer des aides à la décision sur des points très précis, pointues, des solutions originales ou éventuellement des réalisations de tâches administratives qui sont généralement programmables.
On parlera plus de l’IA comme une assistante augmentée.
Ces fonctions aident le manageur dans ses taches au quotidien en l’embarquant dans une «spirale» l’obligeant à terme de travailler complètement avec l’IA ayant un impact directsur ces capacités cognitives.
On assiste donc à un déplacement de la sphère travail du manageur ou l’un et l’autre (IA) devront trouver une place complémentaire et on assistera donc à la naissance du manageur augmenté et de fait au management augmenté.
L’hybridation entre IA et humain positionne le manageur entre le marteau et l’enclume et le manageur n’aura d’autres choix que d’accompagner cette évolution sous peine de ne plus être en adéquation avec le marché du travail. C’est une transformation, donc une évolution, et il faut le prendre comme cela.
Les manageurs devront se transformer et pour intégrer ce changement, il y aura une nécessiter de communiquer, de former, d’acculturer, d’échanger sur cette phase de transition afin de soulever le capot du moteur et de comprendre tous les impacts.
Augmenté la compétitivité managériale via l’IA
Future Workplace a établi que le nombre de nouveaux travailleurs qui utilisent l’IA d’une manière ou d’une autre a augmenté de 18 % en 2019.(3) L’étude réalisée par ce cabinet spécialisé en formation des cadres suggère en outre que d’ici 2031, 80 % des nouveaux postes créés nécessiteront une bonne connaissance de l’IA et que les entreprises feront face à une pénurie de main-d’œuvre dans ce domaine(4).
Les entreprises pour rester compétitive ou gagner en compétitivité recherche toujours à optimiser la valeur ajoutée des processus, des modes d’organisation, des méthodes de travail. L’IA ajoute un complément qui va en ce sens ou l’éthique peut ne plus réellement compter jusqu’à à une remise en cause ou des claches finissent par apparaître au grand jour.
Amazon : l’exemple à suivre ?
Amazon est un chef de fil en matière d’intégration de l’IA dans la gestion des processus et optimisation des méthodes de travail mais aussi de l’évaluation des employés ou l’IA est à même de prendre une décision sur l’avenir d’un employé dans l’entreprise.
L’agence Bloomberg(2) à réaliser une enquête sur l’automatisation des ressources humaines au sein du programme de livraison Flex d’Amazon et met en lumière certaines dérives du management fait par l’IA.
Cette enquête de Bloomberg évoque les licenciements par des robots de chauffeurs du programme Amazon Flex pour assurer les livraisons en quelques heures de son service Prime Now.
Les embauches, rapports de performances et licenciements sont autant de sujets liés aux ressources humaines traités de manière presque totalement automatique et basés sur des algorithmes.
Le tout implanté via une application dans un smartphone qui permet de calculer la durée du travail, l’heure de livraison, le nombre de livraison, les problèmes rencontrés…
Le système agrège également dans le profil des chauffeurs d’innombrables notations concernant leur ponctualité, le temps moyen entre deux livraisons, la satisfaction exprimée par les clients et jusqu’à l’état dans lequel arrivent les cartons.
L’ensemble de toutes ces données sont gérées par une IA qui donne des bons points ou des mauvais points aux salariés et qui prend des décisions
Mais cette approche, de rationalisation du travail, de gestion de la performance, de la qualité peut avoir des limites
A titre d’exemple, une livreuse sans problème a vu sa notation être sévèrement impactée après avoir dû rebrousser chemin jusqu’à l’entrepôt suite à une crevaison. Les semaines qui ont suivi, elle a tout fait pour retrouver une notation correcte et est parvenue à revenir au statut “super” dans l’application, juste en dessous du meilleur échelon (“fantastique”). Las, cela n’a pas empêché le système de la licencier peu après pour “violation des conditions de service”. Elle a évidemment fait appel de cette décision, mais Amazon ne l’a pas réhabilitée.
D’autres exemples sont relatifs aux selfies que les chauffeurs doivent prendre en fonction de l’évolution de la livraison, Si ceci ne sont pas conforment à la norme définie, le salarié peut être licenciés.
A travers ces éléments, on peut voir l’utilisation d’une IA dans le cadre d’une application opérationnelle réelle et de gestion ou le manageur délègue sa gestion à un outil basé sur des algorithmes prédéfinies.
Algorithme qui n’arrivent pas à gérer toutes les situations qu’un chauffeur (employé augmenté) peut avoir au quotidien et qui sanctionne très rapidement. Le manageur augmenté se centrant sur l’analyse quantitative et non qualitative dans ses décisions faisant abstraction d’une réalité quotidienne de travail de ses employées et de leur capacité cognitive.
Le focus étant mis uniquement sur la qualité , satisfaction du client dans l’esprit pur de son fondateur Jefffrey Bezos.
Dans ce cadre, on assiste à un changement organisationnel et à une transformation de l’évaluation du salarié et du rôle du manageur. Le manageur augmenté peut trouver un ROI rapide dans son domaine mais sans une analyse des conséquences pointues, l’impact peut être catastrophiquepour les opérationnels.
Le manageur augmenté devra donc concilier résultat de l’IA et analyse objective afin d’identifier les biais et mettre en place les corrections nécessaires afin d’optimiser la productivité et la coordination avec l’IA
Cette transformation du manageur, à l’expertise à la frontière entre technologie et management, doit aussi être accompagnée par une remise en cause de la gouvernance de l’entreprise.
Conclusion
L’IA nous fait entrer dans le management phygital avec une, capacité à travailler ou on veut, quand on veut, avec des outils différents tout en mettant en lumière des nouveaux modes de management, d’organisation, de façon de faire.
L’IA promet/permet de rendre plus performante l’organisation, mais aussi de rendre chacun des employés augmentés meilleurs à sa tâche. Cette promesse soulève de nouvelles questions éthiques en termes de transparence, d’évaluation, et de relation entre concepteur et utilisateur des technologies, ainsi que la relation de l’employé à son entreprise et à son travail.
Un nouveau millénaire est en cours où chaque entreprise devra inventer sa façon d’utiliser l’IA, une éthique, une culture, une organisation, mais en gardant en tête que l’apprentissage est lent et que l’évolution est semée d’embûche.
Une analyse, conseil, n’hésitez pas à me contacter
Sources :
(1)Voir BBC News, « Algorithm appointed board director »,
(2)Boomberg – https://www.bloomberg.com/news/features/2021-06-28/fired-by-bot-amazon-turns-to-machine-manageurs-and-workers-are-losing-ou
(3) Deloitte Canada : Impératif de perfectionnement Comment faire entrer ses équipes dans l’ère de l’IA : 2020
(4) Caroline Monahan, « The problem with AI: When hard skills are automated and soft skills are needed, the next generation is in big trouble ». Nationalpost.com, 25 octobre 2019. https://nationalpost.com/news/world/artificial-intelligence- will-demand-soft-skills-from-future-generations-they-wont-have-them-though.
Loic Richard :
Artificial Intelligence and Human Capital
My AI, my new assistant !